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économie souterraine

Economie Souterraine - Economie Parallèle

Par Le 02/04/2010

Régulièrement, les quartiers appelés sensibles connaissent des soubresauts avec des débordements de plus en plus graves tant sur les plans humain que matériel. Ces quartiers, très souvent en déshérence sont livrés à quelques bandes de désœuvrés qui y font régner la terreur, dictant leur propres règles et défiant le pouvoir. Les forces de l'ordre, les pompiers, les médecins, les moyens de transport sont régulièrement la cible de ces individus qui défendent un territoire qui ne leur appartient pas.

Les différents politiques de réhabilitation avec les gouffres financiers qui ont suivi n'ont apporté aucune solution, sauf à dépenser des sommes très importantes pour un résultat quasi nul. L'état providence ne peut acheter la tranquillité et ce calme précaire de façade, peut très rapidement dégénérer au gré des humeurs des petits caïds qui en fait font régner cette anarchie, tenant très souvent un double langage en clamant haut et fort l'impossibilité de s'intégrer dans notre société tout en prônant le communautarisme.

Ce rejet de la société et cette forme de ghettoïsation, assumée et défendue par ces individus est particulièrement favorable au développement des circuits d'économie souterraine avec les trafics de stupéfiants, les trafics d'armes, le grand banditisme. Sur le plan local, le trafic de stupéfiants constitue le principal vecteur de cette économie même s'il ne faut pas négliger les autres formes de délinquance.

Les observations effectuées sur l’économie souterraine et la place centrale des trafics de stupéfiants font apparaître trois enseignements principaux :

Le premier enseignement concerne les conditions de l’émergence d’une économie parallèle générée par le trafic de drogue en milieu urbain. Il ne fait aucun doute qu'il existe une forte corrélation entre l’implantation durable de trafics illicites et les processus de marginalisation et d’exclusion sociales. Il s'agit d'un phénomène qui évolue dans un contexte de vulnérabilité liée au chômage. La revente de drogues (cannabis cocaïne et héroïne essentiellement) apparaît comme une alternative.

Elle s’appuie sur la force des liens et des solidarités de quartier qui se développent selon des logiques communautaires. Il s'agit de faire face à la misère sociale, mais également aux effets de la déshumanisation. Autrement dit, « dealer », c’est autofinancer sa consommation, et vivre au jour le jour; mais c’est aussi exister socialement et forcer le respect.

Le second enseignement concerne la diversification des formes de trafic selon les produits, les spécificités locales, les divers acteurs en jeu. La catégorie du trafic local, pour s’en tenir là, est loin d’être homogène. On observe un phénomène de spécialisation des marchés du cannabis d’un côté, de l’héroïne et de la cocaïne de l’autre. Ils s’inscrivent dans des filières de trafic, des modes de distribution, une division du travail, des rapports d’échange avec des clients spécifiques. Si la revente de cannabis est une ressource pour de jeunes habitants des cités, le trafic d’héroïne est plus professionnel et cloisonné, plus risqué aussi, tant au plan répressif que sanitaire et humain.

En fait il existe plusieurs niveaux dans ce marché:

  • Le «dépanneur» (qui revend quelques barrettes à l’occasion pour se faire son «billet»),

  • Le «commerçant indépendant» (isolé, qui revend à ses copains, au lycée, discrètement),

  • Le « réseau structuré » qui répond au flux constant d’usagers à partir d’une équipe soumise à une stricte division du travail et qui assure la circulation des marchandises, des hommes et de l’argent à une vaste échelle.

Le troisième enseignement fait apparaître que les trajectoires sont très diversifiées. En effet, si la figure du «dealer» s’est instituée comme modèle de réussite dans les quartiers et bien au-delà, elle est loin d’être la norme. La situation socio-économique favorise l'émergence des petits trafiquants dont la position est très fragile face notamment aux «caïds», ou à des «équipes» qui se ramifient à des échelles territoriales dépassant largement l’espace résidentiel. C’est à ces niveaux que se font les trafics d’envergure et que s’acquièrent bénéfices et réputations.

Les profits engendrés par ces trafics sont très souvent injectés dans l'économie par le biais de l'immobilier (SCI), commerces ou restaurants, donnant une image de réussite sociale . Elle entraîne de la part du trafiquant un changement de comportement vers une activité plus traditionnelle, se retirant ainsi des « affaires ». Cette vision de réussite sociale est particulièrement néfaste dans la population locale.

Les moyens d'investigation et de lutte nécessaires au démantèlement de ces réseaux, qui minent les circuits économiques légaux, relèvent de plusieurs administrations différentes mais complémentaires. La principale difficulté est de coordonner les énergies afin de pourvoir mener une action efficace.

L'enquête judiciaire est souvent à l'origine de l'ouverture d'un « dossier » et permet avec le plus d'efficacité d'atteindre les buts assignés dans la mesure où elle autorise la mise en oeuvre des cadres juridiques parfois plus coercitifs.

Les interpellations récentes effectuées à TREMBLAYE EN FRANCE avec la saisie de plus de neuf cent mille euros est un cas d'école sur l'existence de cette économie souterraine dans certains quartiers véritablement aux mains de ces malfrats. L'incendie de deux bus et les vives tensions qui règnent dans certains quartiers de cette ville montrent le refus de l'autorité et constitue une réaction violente à l'intervention de la police. Le paradoxe est la mise en cause d'un reportage télévisé sur le trafic de drogue dans cette ville alors que les trafiquants semblaient collaborer activement avec les journalistes, trouvant ainsi un moyen d'exprimer publiquement leur rejet de la société, leur marginalisation, situations dans lesquelles ils se complaisent, trouvant ainsi une tribune pour en quelque sorte se mettre en avant et montrer leur mainmise sur ces quartiers.

La paix sociale ne s'achète pas, les errances de ces trente dernières années dans la mise en œuvre de la politique de la ville sont un échec cuisant et sans vouloir mettre de l'huile sur le feu ni être particulièrement alarmiste, les banlieues d'aujourd'hui sont de véritables poudrières et peut être le principal souci pour demain.